Me Pépé Antoine Lama clarifie l’article 74 du projet de la nouvelle Constitution guinéenne

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Alors que le débat autour du projet de nouvelle Constitution guinéenne s’intensifie, Me Pépé Antoine Lama, avocat au Barreau de Guinée, apporte des précisions essentielles sur l’article 74, pointé du doigt par certains comme un texte accordant une immunité totale au Président de la République, même après la fin de son mandat.

« Certains affirment que ce texte donne un blanc-seing au Président, y compris après son mandat. C’est juridiquement inexact », affirme Me Lama, avant d’inviter à une lecture attentive de l’article 74 du projet de Constitution daté du 30 juin 2025.

Voici le contenu de l’article 74 : « Les anciens présidents de la République et leurs conjoints bénéficient de privilèges davantage matériels, financiers et d’une protection dans les conditions déterminées par une loi organique.

Cette disposition s’applique également à toute personnalité ayant exercé les fonctions de chef de l’État. Les anciens présidents de la République jouissent d’une immunité civile et pénale pour les actes accomplis dans l’exercice régulier de leurs fonctions. »

L’avocat souligne que cette immunité ne saurait être interprétée comme une immunité générale. « Le texte parle exclusivement des actes accomplis dans l’exercice régulier des fonctions. Or, ‘régulier’ signifie conforme à la loi, aux attributions constitutionnelles et aux obligations liées à la charge présidentielle », explique Me Lama.

Cela implique que tout acte manifestement illégal, arbitraire ou commis à des fins personnelles ne bénéficie pas de cette immunité. « Par exemple, des violations graves des droits humains, des détournements de fonds, des crimes économiques, des actes de corruption ou des mesures de répression politique peuvent parfaitement être considérés comme détachables des fonctions officielles, et donc susceptibles de poursuites judiciaires », précise-t-il.

Le projet de Constitution va plus loin en instituant plusieurs mécanismes destinés à garantir la responsabilité des dirigeants :

Une Cour spéciale de justice chargée de juger le Président en exercice (article 160) ;

Une définition rigoureuse de la haute trahison (article 161) ;

Une procédure de révocation populaire via référendum, déclenchée à partir d’une pétition citoyenne (article 162).

« Ce texte ne ferme pas la porte à la justice. Il ne garantit pas l’impunité, mais encadre les protections accordées au Président dans le respect de la fonction présidentielle », conclut Me Pépé Antoine Lama.

Pour lui, « immunité ne signifie pas impunité ». Le droit demeure un instrument au service de la redevabilité, à condition qu’il soit appliqué avec rigueur et impartialité.

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